Cours Vidéos sur la Paracha Ki Tissa
Le Tikoun du monde - Chabat Ki Tissa 5781
Dans la paracha Ki Tissa, ou l’on parle de la faute du veau d’or, on y parle aussi de Chabat Kodech.
On a d’ailleurs l’habitude de dire chaque samedi matin au kidouch, ce verset de la paracha :
וְשָׁמְרוּ בְנֵי יִשְׂרָאֵל אֶת הַשַּׁבָּת לַעֲשׂוֹת אֶת הַשַּׁבָּת לְדֹרֹתָם בְּרִית עוֹלָם (לא, טז)
Les enfants d’Israël seront donc fidèles au sabbat, en l’observant dans toutes leurs générations comme un pacte immuable.
Le Chabat est un lien entre le Maître du monde et le peuple Juif.
Quand un juif garde le Chabat, il témoigne que HaKadoch Baroukh Hou a créé le monde en 6 jours et qu'Il a tout arrêté le septième jour. En effet il est dit au verset suivant :
בֵּינִי וּבֵין בְּנֵי יִשְׂרָאֵל אוֹת הִוא לְעֹלָם: כִּי שֵׁשֶׁת יָמִים עָשָׂה יְהוָה אֶת הַשָּׁמַיִם וְאֶת הָאָרֶץ וּבַיּוֹם הַשְּׁבִיעִי שָׁבַת וַיִּנָּפַשׁ
Entre moi et les enfants d’Israël c’est un symbole perpétuel, attestant qu’en six jours, l’Éternel a fait les cieux et la terre, et que, le septième jour, il a mis fin à l’œuvre et s’est reposé.
Depuis cet arrêt de création, le monde se reproduit par lui-même. HaKadoch Baroukh Hou est la source de tout ce qui existe. Ca C'est Chabbat Kodech.
Ce n’est pas un hasard que le récit de la faute du veau d’or se trouve dans la même paracha qui traite du Chabat. En fait, la faute du veau d’or se répare grâce au Chabat. Rabbi Chim’one, dans la Guemara Chabat, souligne d’ailleurs le fait que même un juif qui fait de l'idolâtrie, même comme les gens de la génération d’Enoch, précurseurs en la matière, sera pardonné de cette faute majeure s’il respecte le Chabat !
Qu'à Chabat de si particulier ?
Chabat est la base même du judaïsme. On pose d’ailleurs communément et souvent la question sur telle ou telle personne quant à savoir si elle est pratiquante : “Cette personne fait-elle Chabat?”. Vous imaginez qu’aux Etats-Unis il y avait des cimetières et synagogues que l’on nommait “Chomer Chabat”... Chabat définit la base du judaisme. Un juif est défini par Chabat. Et Rabbi Chim’one vient souligner que même si une personne a fait de l'idolâtrie, elle sera pardonnée si elle fait Chabat…
On répète alors notre question : qu’est-ce que Chabat ? Rappelons la référence de la Torah. Hachem a créé le monde en 6 jours et Il s’est "reposé" le septième jour. Le “repos” du septième jour est le Chabat. Alors qu’est-ce que le repos ?
Il est vrai qu'à l'échelle humaine, se reposer c’est arrêter ses activités de dur labeur, se prélasser, … C’est physique. Mais pour Hachem, que signifie le repos ? Il n’y a pas chez Hachem de notion d’effort physique, voire même de repos physique ! Cela va de soi !
Le “repos” divin dépasse bien évidemment la notion de repos humain ou de travail… Mais nous sommes quand même obligés à notre niveau de prêter des notions humaines a essayer d'appréhender ce “repos” ou ses notions avoisinantes. Avant tout, le repos nous permet de prendre une distance par rapport à l'action qui a été faite afin de regarder celle-ci, de l’observer et de réaliser si cette action a été faite comme il faut ou non. Ca c’est l’objectif du repos.
וּבַיּוֹם הַשְּׁבִיעִי שָׁבַת וַיִּנָּפַשׁ
Dans un des livres de Kabala, le Sefer HaBahir, il est écrit
יום השבת מקיים את הנפשות
Le Chabat permet aux âmes d’exister.
Quand on construit une machine, on se demande toujours comment maintenir en place celle-ci. C’est aussi valable pour un artiste qui, après avoir fini son œuvre, réfléchira à savoir comment préserver son œuvre. Créer ou façonner entraîne irrémédiablement chez l’homme la volonté de préserver, garder, surveiller son œuvre.
Et c’est ce qui nous permet de comprendre que le terme suivant, qui s’apparente au repos,
וַיִּנָּפַשׁ
définit ainsi la volonté de Hachem de préserver Sa Création.
Quand on est dans le recul pour se permettre de réfléchir à l’action ou la réalisation passée, on peut se permettre, à notre échelle, de déterminer les points négatifs et de décider de comment la réparer. C’est une volonté de préserver notre action de toute influence négative et si notre action en est atteinte, le recul nous permet de vouloir s'arranger pour l’avenir. Une volonté est ainsi une réflexion orientée vers un but, on l'espère constructif et c’est là son but, qui appartient au monde de la pensée, du cerveau. La réflexion hisse l’homme à son plus haut niveau car elle lui permet de penser et d’orienter ses pensées vers une réflexion constructive. Ça c'est Chabat.
Ne pas réfléchir à ses actions, c’est s'entraîner vers un éloignement de Hachem et c’est donc manquer de réflexion et se laisser attirer vers la Avoda Zara, l'idolâtrie. Le Chabat c’est établir clairement et sans équivoque que Hachem a créé le monde, que j’en suis un acteur majeur sinon un associé et que la réflexion dont
il m'a dotée me permet d’analyser mes actions pour les réparer, et ainsi continuer à construire le monde. A contrario, la Avoda Zara, c’est le manque de réflexion, l'éloignement de Hachem, la plongée vers la faute, c’est être emporté vers le manque de recul réfléchir et c’est se détruire et détruire le monde ou en tout cas en sens inverse de la volonté Première de Hachem de créer le monde. Et le cadeau que nous fait Hachem n’est pas seulement que le Chabat est l'antithèse de la Avoda Zara mais que le Chabat se veut être son antidote. Le Chabat répare la Avoda Zara. Il en est son Tikoun. La Avoda Zara, ce sont des actions non réfléchies et emportées par les pensées négatives de son cœur traduisant son éloignement de Hachem. Faire Chabat, c’est commencer à réfléchir sur ses actions passées et les arranger. Le Chabat, c’est entrer dans le monde de la pensée, de la réflexion, le recul, et donc dans le moteur de la réparation de ses fautes. Faire Chabat, c’est permettre à la Nechama d’agir. Le plus grand Tikoun commence par la pensée pour enfin se traduire en actes. Mais la pensée en est primordiale car elle se verra être la cause indispensable aux actions positives futures. Tout se joue donc dans la pensée. On comprendra alors encore mieux ce que nous enseigne la Torah quand elle dit
וְשָׁמְרוּ בְנֵי יִשְׂרָאֵל אֶת הַשַּׁבָּת לַעֲשׂוֹת
Les Enfants d'Israël doivent tout d’abord garder le Chabat, être dans le monde de la pensée afin d’examiner leurs actions et permettre à celles-ci de préserver le monde. Chabat c’est le repos, le recul, la réflexion. Et a Chabat est juxtaposé le terme “Laassot”, traduisant “pour faire”, c'est-à-dire qu’au monde de la pensée, Hachem lui a juxtaposé le monde de l’action.
Et pourtant, il est écrit que Hachem a d’abord agi, par le biais de la création du monde en 6 jours, puis s’est “reposé”. Et dans notre cas, c’est l'inverse, il nous faut d’abord nous “reposer” puis faire Chabat !
En réalité, pour Hachem, il n’y a pas de différence entre la pensée et l’action. Le recul n’est pas nécessaire car le temps, indispensable à l'échelle humaine pour réfléchir, pour Lui n’existe pas. Il est au-dessus du Temps. Il est au-dessus de toute réflexion sur ses actes. Le Chabat de Hachem n’est donc que dans l'intérêt de nous faire réaliser le repos. Dire que Hachem s’est "reposé" est un euphémisme. Hachem a créé le repos. Hachem nous a gratifié de cette "création" pour nous permettre à nous, dépendant du temps, de vivre cette expérience de recul, de réflexion. On ne peut agir sans réflexion. Et c’est pour cela qu'à l'échelle des enfants d'Israël, l'action doit être la conséquence de la réflexion, et c’est pour cela que Hachem nous a d’abord enjoint de garder (VeChamerou) le Chabat dans le but de “faire” (Laassot). La pensée, la réflexion, le recul, l'examen de soi, la décision d’agir au mieux n’est autre que le monde de la Nechama. Et la Nechama est indispensable à l'action.
Et c’est la raison pour laquelle, pour nous, le Chabat c’est faire le Chabat, “Laasot ete HaChabat”, et non “Lichbot ete HaChabat” ce que l’on aurait pu croire que Hachem aurait voulu. On aurait pu croire que le but est uniquement de faire comme Hachem a fait pendant Chabat, c'est-à-dire SE REPOSER pour le Chabat en soi. Non ! Le but est de FAIRE le Chabat. C’est là une différence majeure ! Faire Chabat, c’est, par le biais de non-actions, penser, réfléchir, examiner nos anciennes actions pour les réparer et décider d’en faire de nouvelles constructives. Pour nous, faire c’est la conjugaison penser-faire. Toute la semaine, nous sommes emportés par un tourbillon de vie qui nous empêche de penser. Et donc nos actions ne sont pas de vraies actions. Chabat, ou plutôt faire Chabat, Laasot ete HaChabat, détermine nos vraies actions. Une véritable action, c’est penser et agir. Pas juste agir. Et c'est pour cela que l’on dit “faire Chabat”. On se repose Chabat ? Non ! On fait Chabat ! Par le fait de ne pas agir au sens premier du terme, on revisite ainsi la vraie notion d’agir, de faire. La véritable action, c’est penser-faire. Quelqu’un qui passe tout son chabat au lit pour dormir ou qui occupe son temps à manger ne fait pas Chabat ! Il se repose Chabat mais ne fait pas Chabat comme l’a initialement décidé Hachem ! Faire Chabat, c’est se rapprocher d' Hachem, c’est de réfléchir. Faire Chabat, c’est étudier la Torah pendant Chabat. C’est de définir une meilleure semaine à venir pour se rapprocher encore plus de Hachem.
וְשָׁמְרוּ בְנֵי יִשְׂרָאֵל אֶת הַשַּׁבָּת לַעֲשׂוֹת אֶת הַשַּׁבָּת
Et c’est pour cela que la réparation du monde entier, le tikoun du monde entier, commence par faire Chabat.
Je vous souhaite à tous Chabat Chalom Oumevorakh.
Rav Yaacov B. Harrar